Marilou,
Je t’écris, même si jamais tu ne liras cette lettre qui t’est pourtant destinée.
Ce matin du 2 août 2017 fut l’aboutissement d’une trop longue attente pour ton papa et moi. Ce matin du 2 août 2017, nous arrivions à l’hôpital pour te dire adieu, après des mois passés à vivre dans l’attente, l’incertitude, et même l’espoir de te rencontrer, en santé.
Ce matin-là, je me réjouissais encore plus qu’à l’habitude de tous tes mouvements dans mon ventre. Tes derniers. Presque 34 semaines à te porter. À t’aimer. À t’attendre. À t’espérer en santé. Ton frère et tes sœurs qui me rappelaient tous les jours à quel point ils avaient hâte que tu sois parmi nous. Une grossesse pratiquement parfaite : peu de vilains maux, tes mouvements calmes, un hoquet par ci par là. Je connaissais déjà ta douceur.
La veille, j’ai pleuré et hurlé ton nom. La douleur d’une mère que je pouvais enfin sortir. Je t’ai dit que je m’excusais de te faire ça. De t’avoir fait malade. Je ne crois pas aux anges, Marilou, mais pendant un moment, j’espérais que s’il y avait un paradis, tu y serais et que jamais tu ne m’en voudrais.
Marilou. Quelques minutes avant que tu sortes, j’ai paniqué. J’ai eu peur de te rencontrer. Tout est allé si vite, je pensais en avoir encore pour quelques heures avant ton arrivée. Et pourtant, quand tu es sortie, le soulagement fut immense. Ton silence, éprouvant. Celle qu’on entendait pleurer dans la chambre, ce n’était pas toi. C’était moi.
J’ai voulu te voir quelques instants après, quand le calme dans ma tête est revenu. L’infirmière t’avait mis ton pyjama avec des cœurs, soigneusement choisi par ton frère et tes sœurs. « Pour dire je t’aime Marilou », qu’ils ont dit. Tu étais belle. Tu ressemblais à l’une de tes deux grandes sœurs. Tu avais l’air paisible, endormie pour toujours dans le ventre de ta maman, là où tu étais bien.
Je t’ai embrassée, je t’ai flattée, je t’ai collée. J’essayais de m’imprégner de toi, pour ne pas oublier tes petits cheveux noirs ou tes petites joues pareilles comme les miennes. Quand ton grand frère est venu te voir le lendemain de ta naissance, il te donnait pleins de bisous. Tes sœurs te flattaient. « Elle est froide, maman ». La vie et la mort qui se côtoient, l’air serein. C’est beau, l’enfance.
Pendant un moment, nous formions une famille de six. C’est Karine, de la Fondation Portraits d’Étincelles, qui est venue immortaliser ce moment. Ta main et celle de tes sœurs et de ton frère, réunies ensembles. Nous avons accroché la photo au mur, à la maison. Nos quatre enfants. Si tu savais comme cette photo nous fait du bien. L’espace d’un instant, tu vis un peu plus.
Marilou. Même si parfois, à l’épicerie, quand on me dit : « ah, vous en avez trois ! » et que j’acquiesce, ce n’est pas parce que je t’oublie. C’est pour m’éviter de fondre en larmes devant des inconnus en t’évoquant. Le vide que tu as laissé est immense, mais chaque jour, chaque heure, j’ai une pensée pour toi qui devais être près de nous. Tu nous habites.
Tout ça est parti d’un petit doigt de trop, mais qui nous a permis de t’éviter une vie de souffrances. Tu nous aides à grandir, Marilou. À devenir de meilleures personnes, reconnaissantes des beaux cadeaux de la vie. Et s’il y a un paradis, un jour, je t’y retrouverai pour te chanter des berceuses, comme je le fais encore pour ton frère et tes sœurs.
Ta maman qui t’adore
« Je t’aimerai toujours
La nuit comme le jour
Et tant que je vivrai
Tu seras mon bébé » (Robert Munsch, I love you forever)
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