C’est le 16 septembre 2023 que nous avons appris que tu étais là. Tu es arrivé dans nos vies quand on ne s’y attendait le moins, tu étais réellement une surprise. Une bonne surprise, crois-moi. Ok peut-être un peu moins pour ton grand frère sur le coup, mais faut le comprendre ça fait 7 ans qu’il est tout seul. Après 5 ans en fertilité, 5 essais in vitro dont une fausse couche, après ton grand frère on n’y croyait plus. On était fous de joie et toute la famille aussi. Par contre on essayait de la contenir un peu. On était en fertilité parce que je suis porteuse du x fragile et c’était la seule façon de contrer le gène avec le diagnostic préimplantatoire, mais tu étais déjà là donc on avait pu de contrôle sur le gène. Tu sais ce gène peut faire que ta vie ne soit pas facile et que tu dépendes de nous le restant de tes jours. On se retient un peu de célébrer parce qu’il y a quand même 1 chance sur 2 que tu sois atteint, mais on veut voir le positif et croire que tout sera correct.
Pendant les premières semaines, j’étais plus effrayée d’une fausse couche comme à la dernière grossesse que du x fragile. Les semaines ont passées et tu t’étais bien accroché. Un signe de plus qui nous amenait à croire que tout ira bien et que bientôt on t’accueillerait parmi nous.
30 novembre je suis à 15,6sa, c’est le jour de l’amniocentèse. C’est la seule façon qu’on a de savoir si tu es atteint de la maladie ou non. Tout se déroule bien, plus de stress que de mal. À partir de ce moment, le décompte de 3 semaines commence. Sais-tu que 3 semaines c’est interminable? Je me doute que tu dois le savoir dû au fait que tu dois ressentir notre stress.
18 décembre 16h10, je reçois l’appel tant attendu. Je suis seul avec ton frère étant donné que papa est en train d’aider chez mamie. La conseillère en génétique me demande si je veux l’attendre. Nous étions tellement impatients que je décide de ne pas l’attendre. Quand elle commence à parler pour m’annoncer les résultats, ses mots semblent interminables. Le verdict… tu es atteint du x fragile, mon monde vient de s’arrêter, nos espoirs se sont transformés. Elle me demande si je veux savoir le sexe, car si tu es un petit garçon le pronostic est moins favorable. Les chances que tu sois atteint plus sévèrement sont quasi certaine. Tu es un petit garçon…mon univers vient de s’écrouler, j’ai le cerveau dans la brume. Je n’arrive plus à entendre ce qu’elle me dit. J’appelle papa pour lui dire qu’on a reçu les résultats; il comprend avec mon silence que ce ne sont pas ceux attendus. Nous sommes les 3 dévastés par la nouvelle, la famille et les amis aussi. Tout semblait parfait jusqu’à maintenant alors nous osions croire que tout était correct. Sais-tu que je suis soulagée de ne pas avoir attendu d’annoncer ta venue à nos proches puisque maintenant ils sont tous là pour nous soutenir.
21 décembre, on rencontre l’obstétricienne. Notre décision est déjà prise même si nous la prenons à contre cœur. ¨Ça ne serait pas une vie pour toi avec toutes ces limitations. Qui prendrait soins de toi une fois qu’on serait plus là pour le faire? C’est une décision qu’aucun parent veut avoir à prendre mais nous devions le faire pour toi. Nous planifions avec le médecin l’arrêt de la grossesse après les fêtes. Je lui ai demandé que le tout se déroule après parce que ce n’est pas un souvenir que je veux associer. Je veux aussi profiter de Noël avec ton grand frère qui attend Noël avec impatience et je crois que secrètement je veux encore profiter du temps avec toi. Profiter de ma bedaine qui commence à se dessiner depuis les dernières semaines.
4 janvier, nous t’avons choisi un nom, tu t’appelleras Charles. La nuit dernière n’a pas été évidente. Du stress, de la culpabilité et vouloir profiter des derniers moments ensemble; disons que la nuit a été courte. Peu de temps après notre arrivée à l’hôpital, vers 11h00, on m’administre les premiers comprimés de Misoprostol. Ce n’est pas l’envie qui manquait juste avant de m’enfuir. Vers 15h00, les premières contractions se font ressentir, le tout se déroule assez rapidement. Je n’ai même pas eu le temps de demander l’épidurale quand les contractions sont devenues plus fortes, car à 18h25 tu es arrivé mon beau petit Charles. Quand papa t’a vu, la première chose qu’il m’a dit, c’est que tu avais la même baboune que ton frère avait quand il est né. Il me dit aussi que tu as l’air bien et serein, ça me rassure. Enfin on t’approche de moi pour que je puisse enfin t’admirer. Tu es si petit. Tu as l’air si fragile, c’est normal étant donné que tu as seulement 20,6 sa mais tu es parfait. C’est dure à croire que tu sois atteint de la maladie puisque tu n’as aucun défaut à l’extérieur, tout se passe dans ton cerveau. J’essaie de me le rappeler parce que ce n’est pas évident, tu es tellement beau. Je te prends, je te berce pour te donner le plus d’amour possible vu que ça sera notre seule occasion d’avoir un moment ensemble. Tes 2 mamies et ton frère sont venus te voir, car eux aussi voulait te connaitre. On a demandé les services de la Fondation portraits d’étincelles pour pouvoir garder le plus de souvenirs de toi possible. À notre grande surprise, quand la photographe est arrivée dans la chambre, on l’a bien reconnue étant donné que c’est elle qui nous suit depuis que ton frère est dans mon ventre. Quel adon!
Arrive, pour nous, le moment de quitter. C’est impensable pour moi de te laisser derrière nous sans notre chaleur, ça me fend le cœur. On prend encore quelques minutes avec toi. On en profite au maximum. On sait que ça sera la dernière fois. On verse tous les larmes de notre corps. Ce qui nous apporte un peu de réconfort c’est de savoir que ton grand-père Léon t’attend en haut et qu’il s’occupera aussi bien de toi qu’il l’a fait avec moi.
On fini par quitter, mais te laisser là dans cette grande chambre tout seul dans ton lit est beaucoup trop difficile. C’est à ce moment que l’infirmière nous propose de t’amener auprès d’elle le temps qu’on vienne te chercher. Papa te couvre bien, il a peur que tu aies froid même s’il sait que ce n’est pas rationnel, mais c’est plus fort que lui. On te suit dans le corridor et l’infirmière t’apporte dans une pièce près d’elle. C’est si dur de te laisser là. En passant devant le poste des infirmières, j’ai juste le goût de m’effondrer. Je sais qu’elles sont là, qu’elles me regardent sûrement par compassion mais c’est trop douloureux de les regarder. On réussit à traverser les portes de la maternité, ce n’est pas croyable à quel point c’est pénible de repartir sans toi avec comme souvenir quelques photos et une boîte contenant tes vêtements, mais surtout avec le ventre vide.
Quelques semaines ont passées depuis. Ce n’est pas toujours facile, mais je sais que la douleur finira par s’atténuer. Je sais qu’on ne sera plus jamais les mêmes après cette épreuve, mais j’ai eu la chance que tu fasses partie de nos vies même si ça l’a été trop court. L’idée que tu sois avec nous a été brève, mais tu seras toujours dans nos cœurs. Quand on regardera les étoiles et qu’on verra 2 étoiles briller une à coté de l’autre, on saura que c’est grand-père Léon qui te bercera là-haut. Ton passage a été comme une étoile filante, mais tu continueras à briller dans nos cœurs. Alors, je voulais laisser une trace de ton histoire sur cette terre.
Brille petite étoile.
Ta maman qui t’aimera pour toujours.
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