Léa a fêté son 3e anniverciel en novembre dernier. Je me sentais prête à mettre en lumière son histoire, sa naissance. Une sorte d’hommage pour elle, ses parents, sa famille. Je voulais partager son récit, cette vision différente que j’ai vécue. Ce regard c’est le mien, celui d’une accompagnante à la naissance qui se retrouve au cœur de la naissance d’une étincelle.
Cette journée-là, j’ai pu observer le sens des mots : famille, soutien, amour, présence, chaleur, humanisme, vérité, beauté, force… En quelques heures, Léa m’a montré que malgré la pire épreuve, je pouvais continuer de voir le beau.
Voici comment tout a commencé.
C’est par un soir de mai que j’ai rencontré ses parents, Andréanne et Marc-André, pour la toute première fois. Un « match » parfait. Beaucoup de jasette au rendez-vous. Je salue ici la patience de son papa! Puis, nous nous sommes revus en septembre et octobre pour nous préparer à son arrivée. À chacune de nos rencontres, je voyais les yeux de ses parents remplis d’amour pour elle. J’observais sa maman flatter sa bedaine, tout en me jasant! Je voyais déjà l’équipe formidable qu’ils formaient.
C’est le dimanche 3 novembre que l’aventure a commencé. Ses parents avaient rendez-vous afin d’induire le travail. À la grande surprise de sa maman, les contractions ont commencé 5 minutes après le début de la procédure. Elles vécurent ensemble les vagues des contractions toute la journée de dimanche ainsi que la nuit du dimanche au lundi. Rien d’assez intense pour retourner à l’hôpital.
C’est donc lundi le 4 novembre que nous nous sommes retrouvés à l’hôpital pour la suite de l’induction. Encore du gel. Encore des vagues. Nous croisions les doigts que le travail commence. Après quelques heures, ils nous ont retournés à la maison. Le repos était de mise. Tranquillement, les vagues continuaient leur travail.
Durant la nuit, la maman me fait comprendre qu’il est temps de retourner vers l’hôpital. Les vagues sont intenses et le repos n’est plus une option. Chacun de notre côté, nous reprenons la route.
Notre arrivée est remplie de fébrilité. Est-ce enfin le début de sa venue au monde? Puis, notre fébrilité se transforme en questionnement, en attente, en doute et finalement, en ce qui nous transformera à jamais. Le verdict que personne ne veut entendre tombe : son petit cœur s’est envolé.
Pleurs, silence, incompréhension, douleur, intensité, irréalité…Des longues minutes à ne rien y comprendre…à ne pas y croire…pour la 2e fois, le même malheur arrivait dans la famille d’Andréanne. Léa allait rejoindre sa cousine Rose, partie en janvier 2019, soit 10 mois avant elle.
À partir de ce moment, je me suis demandé si j’allais être à la hauteur. Si la force allait être mon alliée. Si j’allais tenir le coup. L’espace d’un instant, j’ai douté. Puis, je me suis souvenu de la raison pour laquelle j’étais auprès de ses parents. Ils m’avaient fait confiance pour que je les accompagne. Ils n’avaient pas choisi leur destin. Ils avaient besoin d’être accompagnés et c’était mon engagement envers eux.
La vie a fait son œuvre. Elle m’a rappelé que dans chaque épreuve que l’on vit, il y a du beau! « Je t’aime » « Je t’aime », ces mots si fort, échangés par les futurs parents, se sont mis à résonner dans la chambre. De l’amour pur.
Et pendant que l’amour remplissait la chambre, la forteresse, à la fois fragile et inébranlable de sa famille se bâtissait dans le corridor. Les grands-parents sont arrivés. Deux par deux. La forteresse était maintenant composée de six piliers, grands et forts. Cette image si forte dans ma tête, venait me confirmer ce que je savais déjà : la famille, c’est plus fort que tout!
Les heures passent…maman essaie de se reposer, papa fait sa bulle tout en musique. Chacun prend le temps.
Je profite de ces instants pour parler avec les grands-parents. On parle de tout. J’apprends à connaitre les racines de cette grande famille. Je me fais parfois messagère. Je les accompagne eux aussi, de mon mieux. Ils m’accueillent comme si je faisais partie de la famille. Un réconfort inespéré qui me confirme ma place à leur côté.
Les minutes et les heures continuent de passer…on dirait que c’est au compte-goutte…mais à bien y repenser…je crois que tout le monde avait besoin de ce temps précieux. Pendant ces longs moments, Léa fait son chemin tranquillement. Elle nous prépare à la voir.
La forteresse s’agrandit. Les oncles, les tantes s’ajoutent, elle compte dix piliers. Chaque pilier se donne mutuellement la force d’être là. Chaque pilier profite d’un temps unique et précieux auprès des futurs parents. Chaque pilier est important. Parmi eux, Valérie et Étienne, parents de Rose, seront d’un réconfort immense et significatif.
Cette grande richesse permet d’apaiser les tourments le temps de quelques sourires et même de quelques rires.
L’espace d’un instant. Tout semble normal. Ça fait du bien.
Cette pause nous redonne de l’énergie pour pouvoir l’accueillir. Il est temps de la laisser venir au monde. La poussée se fait sentir… maman donne ce qui lui reste de puissance pour pouvoir enfin la voir. Papa la supporte, caresse ses cheveux, l’encourage. Ils sont si beaux ces deux-là.
00h21
Léa est née. Elle est là. Si belle et si grande.
Maman et papa nettoient ses cheveux et son visage. C’est puissant ce qui remonte comme émotions. Ils peuvent enfin savourer tous ses petits traits. La forteresse est soulagée de la savoir enfin arrivée. Ils attendent à tour de rôle leur moment unique avec elle. Je suis une fois de plus frappée par la douceur de ce moment. Sans mot. Simplement des regards pour permettre de savoir qui seront les prochains à vivre leur moment. Chaque pilier prend le temps et laisse le temps aux autres. Je les observe avec le sourire, c’est si important ce moment avec elle. Je suis éblouie et rassurée de voir qu’ils sont si bien entourés. Avant de quitter, chaque pilier me remercie, avec des mots ou des câlins. Incroyable. Je suis soufflée par tout cet amour sincère et puissant.
Puis, les parents me demandent si je veux la prendre. Mon cœur veut exploser. Bien sûr que je veux la prendre. Quel honneur, quel bonheur! À cet instant, le temps s’est suspendu. Je l’ai admirée, je l’ai cajolée avec tout mon amour.
Le cœur en paix, le cœur rempli, le cœur différent… je suis retournée chez moi, changée à jamais. La naissance de Léa est la plus intense que j’ai eu la chance de vivre, de voir et de sentir dans tout mon corps. Cette intensité qui repasse souvent me voir et que je prends le temps d’accueillir et de saluer. Elle fait partie de mon histoire de vie, tout comme ses parents. Quel cadeau pour moi!
Ma belle Léa, vois-tu tout ce que tu m’as appris dans ton court passage? Merci. Je te garde dans mon cœur pour la vie xx Laurianne Letarte, accompagnante à la naissance.
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