Tout s’est passé tellement vite. En septembre dernier, tout a basculé en 3 semaines. Et nous n’avons eu qu’une semaine pour choisir entre ma vie et celle de notre garçon. Voici l’histoire de Lucas.
Tout a débuté vers le mois de mai 2021 avec de petits saignements, mais rien d’inquiétant. Plus le temps avançait, plus je me disais que c’était la préménopause. La saison avançait, j’étais dans les rénovations ressentant toutes sortes d’effets sur mon corps : les muscles endoloris, de la fatigue chronique, un mal de dos, un mal de ventre. Une certaine journée, je me suis étendue pour me reposer et, le lendemain, tout semblait être rentré dans l’ordre. La routine continuait… le travail, la famille.
Plusieurs semaines plus tard, plus rien n’allait. Les saignements devenaient beaucoup plus fréquents et abondants, mon mal de ventre était de plus en plus douloureux. Le 26 août, papa et moi avons décidé de nous rendre à l’urgence. J’ai rencontré le médecin et il m’a questionnée sur ma santé. Il a alors décidé de nous faire passer une échographie et c’est là que j’ai entendu les mots raisonner: « Madame, vous êtes enceinte de 20 semaines et c’est un petit garçon! ».
Un frisson m’a parcouru tout le corps lorsque je t’ai vu, si minuscule apparaitre à l’écran. On m’a installée sur une civière pour la nuit. Les examens ont été repoussés au lendemain matin pour que je puisse me reposer. J’avais peine à croire que tu étais bien au chaud en moi depuis tant de mois.
Le lendemain matin, on m’a fait passer une échographie et des prises de sang. On nous a indiqué que je n’avais pas beaucoup de liquide amiotique et que, vu mes saignements, le placenta était décollé. On m’a alors conseillé d’avorter. Ouf quelle nouvelle ! Le médecin nous a expliqué que vu mon âge avancé et plusieurs autres facteurs, ma grossesse serait considérée comme une grossesse à risque. Après avoir passé plusieurs nuits blanches à nous questionner, nous nous sommes présentés, papa et moi, au rendez-vous pour effectuer l’avortement. À peine assise sur la chaise d’attente, nous savions tous les deux que nous ne voulions pas mettre fin à la grossesse. Nous avons décidé de quitter la clinique sur le champ. Ça été la meilleure décision que nous avons prise. Tu étais là, bien vivant dans mon ventre. Je sentais tes petits coups de pieds, tout ne pouvait pas s’arrêter là.
Les saignements demeuraient toujours aussi fréquents et abondants. Le lendemain, nous avons dû retourner à l’urgence. Mon dossier a été transféré à l’hôpital Ste-Justine en raison des soins plus spécifiques qui étaient nécessaires. Après quelques jours d’attente, on m’a fixé un 1er rendez-vous. Alors que nous étions persuadés que cette rencontre auprès d’un spécialiste serait simplement pour nous indiquer la marche à suivre, à avoir plus de détails sur ta santé et sur ce qu’on devait faire pour éviter une grossesse prématurée, c’est tout le contraire qui s’est produit. On m’a annoncé qu’on devait m’hospitaliser sur le champ, que ma santé était précaire et la tienne également. Je faisais de l’anémie et mon sang ne coagulait pas. Tu n’avais toujours pas beaucoup de liquide amniotique et le placenta demeurait décollé. Après deux jours d’examens à l’hôpital, on a décidé de provoquer l’accouchement. J’étais de plus en plus faible. Il faillait te sortir, mais tu n’avais que 23 semaines et 3 jours. C’était atroce.
Dans ma tête, on devait TE sauver. J’ai demandé une césarienne, car je savais que tu allais te présenter par les fesses et que ça allait donc être une naissance difficile. Cette option n’était pas possible pour moi. On m’a répété sans cesse qu’on devait éviter le plus de saignements possibles, car cela pouvait être fatal pour ma vie.
Avant l’accouchement, on m’a injecté des médicaments pour aider tes poumons et ton cerveau. On a vraiment tout essayé pour te donner le plus de chance possible. J’ai rencontré les professionnels de la santé : l’anesthésiste, gynécologue et infirmières. La rencontre la plus difficile a été celle de l’équipe de natalité. Quels soins devions-nous te procurer à ta naissance? Désirons-nous te voir à ta naissance? Quels étaient les risques que tu aies des problèmes de santé? Nous avons décidé de te procurer les premiers soins et d’analyser le tout un jour à la fois.
Aux deux heures environ tout le long de l’accouchement, on a écouté ton cœur. À chaque fois, j’arrêtais de respirer. Je craignais ne plus l’entendre. Ce sont des minutes d’attente interminables…chaque fois que le personnel plaçait le moniteur à la recherche de ton petit cœur. À toutes les fois, je demandais à l’infirmière si tu allais bien.
Quand on te répond : « oui il va bien mais il a de la difficulté à reprendre après une contraction », c’est difficile pour un cœur de maman. Je veux juste pouvoir pousser pour te sortir et te sauver. Après plus de vingt-trois heures de travail, à 14h27 le 16 septembre, l’infirmière a constaté que ton petit cœur ne battait plus.
C’est le médecin qui a dû nous annoncer ton décès. Je ne voulais pas entendre ces mots. Les larmes se sont mises à couler. Mon rêve de t’avoir avec nous venait de s’écrouler.
Je sais que tu m’as préparé à cette nouvelle, car la seule chose qui est sortie de ma bouche, c’est que tu avais pris la décision pour nous. Te doutais-tu qu’à ta naissance les soins qu’on aurait dû te procurer pendant plusieurs mois auraient été difficiles et que cela aurait été épouvantable pour nous de te voir ainsi? Est-ce que tu te doutais qu’à un moment donné nous aurions dû prendre des décisions difficiles pour toi ? Comment aurions-nous pu en tant que parents décider que ta vie s’arrêtait advenant des problèmes médicaux?
Le moment de l’accouchement. On m’avise que l’on n’entendra pas tes pleurs, qu’il n’y aura que le silence. C’est un moment que l’on n’oublie jamais.
J’avais peur à ta rencontre, j’avais peur de ne pas te trouver beau, de ne pas être capable de te regarder. Mais c’est tout le contraire qui s’est passé. Tu étais merveilleux, serein, mais tout petit, si fragile. Tu étais là, près de moi. On t’a cajolé, on a pleuré. Tes mains, elles étaient grandes, avec de longs doigts. On a pris des photos de toi. Ta sœur est venue te voir aussi. Ça été un beau moment. Le plus difficile a été de te dire au revoir.
Je n’ai pas les mots pour te dire la souffrance qu’on peut ressentir. Les questions sans réponses. La honte qu’on ressent. Comme si c’était de notre faute ce qui c’était passé.
C’est tellement difficile encore de te regarder sur les photos. La douleur est toujours là. Jamais je n’oublierai ta petite tête qui me faisait une minuscule petite bosse sur le ventre. Quand j’ai des moments un peu plus difficiles, je prends ta petite couverture de naissance et j’y sens encore ton odeur de bébé. Tu es présent avec nous maintenant dans un petit cœur. J’ai cette chance que tu ressembles beaucoup à ton papa, je te vois en lui.
Cher Lucas, petite lumière qui brille, merci de nous avoir choisi, tu es maintenant avec les anges, notre ange qui veille sur nous. On t’aime tellement. Maman et papa xxx
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