C’est par un petit matin d’octobre que j’ai eu la surprise tant attendue: le test de grossesse était positif. En seulement deux mois d’essai, j’étais enceinte. J’avais attendu environ 3 ans avant que ce soit le moment idéal afin qu’Hugo et moi soyons prêts à être parents. Hugo était de retour aux études et nous voulions être disponible pour notre enfant le moment venu. Ce n’était pas une décision prise à la légère d’avoir un enfant. Nous avions parlé d’adoption et de différents scénarios. J’étais très réaliste à l’idée de peut-être faire une fausse couche, que ça prenne du temps tomber enceinte ou encore de la possibilité d’être infertile… mais jamais je n’avais pensé à un accouchement prématuré.
J’étais malade tout au long de ma grossesse : maux de cœur, vomissements, dédain de tout, maux d’estomac, fatigue, douleurs articulaires, entorse cervicale, maux de tête. C’était une grossesse difficile, mais je prenais du repos et j’essayais de ne pas paniquer à chaque maux. Les suivis de grossesse étaient normaux, les échographies aussi. Aby se développait correctement au plaisir de papa er maman.
Le 28 mars 2019, je ne me sentais pas mieux que les autres jours, mais en plus j’avais une barre de douleur sous les seins. La douleur irradiait jusque dans le dos. Je me suis rendue à l’hôpital. Ma pression était un peu haute, mes labos sanguin n’étaient pas super. Ils m’ont gardé pour la nuit et le lendemain après-midi, j’apprenais que j’étais transférée d’urgence à Sainte-Justine pour un syndrome de HELLP. J’étais assez stable au moment de mon transfert, ce n’est qu’au lendemain ou j’ai eu un décollement placentaire qui s’est terminé en césarienne d’urgence.
Aby est née le 31 mars 2019 à 11h41. J’ai eu environ 30 minutes pour me préparer entre l’annonce de ma césarienne et sa naissance. La néonatalogiste est venue me voir m’expliquant qu’il y avait un risque de mortalité pour Aby et pour moi aussi si on ne me faisait pas cette césarienne. J’étais sous le choc, Aby n’avait que 24 semaines, elle devait rester dans mon ventre…
La césarienne a été très traumatisante pour moi, même si tout s’est bien déroulé pour Aby. Elle pesait 610g. J’ai pu voir pour la première fois ma fille en soirée le 31 mars… j’étais très déroutée. J’avais l’impression qu’on m’avait volé mon enfant de mon ventre, j’avais peine à croire que le minuscule bébé de l’incubateur était ma fille. C’était très culpabilisant pour moi de ne pas être capable de la reconnaître comme ma fille… et ça m’a pris plusieurs semaines avant que mon lien d’attachement soit complètement développé.
Ma fille n’était pas comme je l’imaginais… Malgré tout, j’ai fait les efforts nécessaires pour qu’elle soit bien. Je tirais mon lait pour qu’elle puisse s’en nourrir par son tube de gavage, j’étais à son chevet à chaque jour avec son papa. Nous passions entre 8 et 12 heures par jour avec elle, puis nous restions les nuits où son état était instable. Aby était une petite personne à part entière, elle avait son caractère, elle aimait la visite des soignants, elle aimait se faire caresser les cheveux, tenir la main, se faire prendre par ses parents. Elle était très calme quand nous étions avec elle, elle ne pleurait pratiquement jamais, même pendant les examens. Tout le personnel de Sainte-Justine et notre entourage qui prenait des nouvelles d’elle via un groupe que j’avais créé sur Facebook s’attachait à notre petit poussin qui grandissait au fil des semaines.
Pendant 16 semaines, nous avons veillé notre fille, mais nous voyions bien que sa condition pulmonaire de s’améliorait pas… elle se détériorait même. Elle a eu une pneumonie qui nous l’a pratiquement prise à 13 semaines de vie. Une fois stabilisée, les mauvaises nouvelles se sont accumulées…
Notre fille avait un affaiblissement de ses tissus au niveau de ses bronches et de sa traché. Elle avait aussi des poumons peu développés et très malades. Le volume de son cœur avait grossi. Elle avait 2 problèmes cardiaques non opérables vu sa condition. Son cerveau était sous-développé…bref c’était les pires nouvelles que l’on pouvait entendre.
Les spécialistes étaient formels, il n’y avait rien à faire sauf lui donner des soins palliatifs. Mon conjoint et moi avons dû prendre la décision la plus difficile de notre vie, mais aussi la décision la plus remplie d’amour et de compassion : nous devions la débrancher pour arrêter de la faire souffrir. Nous avons choisi que sa dernière journée sur terre soit la journée où il était prévu qu’elle naisse : le 20 juillet 2019.
L’équipe de Sainte-Justine nous a accompagnés avec beaucoup de douceur. C’est à ce moment qu’ils nous ont parlé de Portraits d’Étincelles. Je connaissais déjà l’organisme et j’étais ravie de penser que nous pourrions avoir des photos de famille avant son grand départ. Malheureusement, aucun photographe ne pouvait venir la journée du décès, mais plutôt seulement la journée avant son décès. Nous sortions un peu des critères pour avoir droit à notre séance photo, mais le bénévole, touché par notre histoire, a tout de même accepté de faire la séance avec nous et notre petite Aby.
Ces souvenirs sont les derniers moments de famille que nous avons eus tous les trois. Le lendemain de la séance photo, nous avons eu le temps de présenter notre fille à des membres de nos familles. Aby est décédée doucement, blottie dans les bras de sa maman et de son papa.
La naissance prématurée de notre enfant et sa perte sont les expériences les plus difficiles de notre vie. L’admiration et la fierté que nous avons envers notre fille est sans limite. Sa si courte existence sur terre nous a permis de vivre des moments de famille inoubliables et nous nous sentons choyés d’avoir pu apprendre à la connaître. Il n’y a pas de mots assez forts pour décrire l’impuissance que nous ressentons face à cet évènement, mais mon conjoint et moi sommes d’accord pour dire qu’il nous a rapprochés l’un de l’autre. Dans la douleur et l’inquiétude, nous nous avions l’un et l’autre. Aby nous montrait le chemin par son calme devant tellement d’épreuves qu’elle devait vivre pour son si jeune âge.
J’ai écrit ces mots avec encore beaucoup de chagrin qui m’habite. Notre fille nous manque chaque jour. Nous pensons à elle continuellement et nous essayons de lui rendre hommage. Un mur entier arbore nos photos de famille à la maison. Les photos prises par Portraits d’Étincelles sont bien en vue et nous bercent lorsque nous sentons que nos moments de famille sont loin.
Aby ne sera jamais oubliée, elle est notre trésor le plus précieux et nous l’aimerons toujours plus fort.
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